Je ne peux m’empêcher d’évoquer Jean Rostand, un grand libre-penseur, que j’ai eu le grand honneur de rencontrer en 1971 dans sa maison de Ville-d’Avray alors que j’étais en première année de doctorat à Orléans. Je me rappellerai toujours de l’instant où je franchissais le portail d’entrée et qu’il m’attendait en haut des marches de sa villa. L’entretien dura une heure pendant laquelle il se montra prévenant et attentif à tout ce qui étaient mes préoccupations du moment. Nous étions dans son grand salon entouré de tous les souvenirs de son père Edmond Rostand et de sa mère Rosemonde Gérard. Il m’a proposé de me parrainer à une Bourse de la Vocation et même de me présenter à Haroun Tazieff, puisque mes études universitaires concernaient la géologie. Et bien sûr, il me dit de venir à ses "dimanches de Ville-d’Avray", trop mondains à mon goût. Peut-être ai-je eu tord de ne pas y aller? Il y a des moments dans la vie qu’il faut saisir dès qu’ils se présentent, comme des signes du destin.
G.C.
Jean Rostand (1894-1977)
Jean Rostand, né le 30 octobre 1894 à Paris (17e arrondissement) et mort le 4 septembre 1977 à Ville-d'Avray (Hauts-de-Seine), est un écrivain, moraliste, biologiste, historien des Sciences et académicien français.
Fils du dramaturge Edmond Rostand et de la poétesse Rosemonde Gérard, Jean Rostand passe son enfance à la villa Arnaga, à Cambo-les-Bains (Pays basque). À l'âge de dix ans, il découvre les Souvenirs entomologiques de Jean-Henri Fabre. En 1920, il se marie avec Andrée, née Mante. Ils auront un fils François (1921–2003). Licencié ès-sciences de la Faculté de Paris, Jean Rostand s'installe à Ville-d'Avray en 1922, après la mort de son père (1918).
Il participe à la création de la section de biologie au Palais de la Découverte, en 1936, puis fonde à Ville-d'Avray son propre laboratoire indépendant : la fortune familiale lui permet de se tenir à l'écart des structures universitaires, qu'il juge trop contraignantes. Très intéressé par les origines de la vie, il étudie la biologie des batraciens (grenouilles, crapauds), la parthénogénèse, l'action du froid sur les œufs, et promeut de multiples recherches sur l'hérédité.
Jean Rostand commence par publier quelques essais philosophiques, puis partage son temps entre son métier de chercheur et une très abondante production scientifique et littéraire. Avec conviction et enthousiasme, il s'efforce de vulgariser la biologie auprès d'un large public (il reçoit en 1959 le prix Kalinga de vulgarisation scientifique) et d'alerter l'opinion sur la gravité des problèmes humains qu'elle pose. Considérant la biologie comme devant être porteuse d'une morale, il met en garde contre les dangers qui menacent les hommes lorsqu'ils jouent aux apprentis sorciers, comme les tenants de l'eugénisme.
Jean Rostand est aussi pacifiste. Également féministe, il contribuera avec Simone de Beauvoir, Christiane Rochefort et quelques autres, à créer le mouvement féministe Choisir la cause des femmes.
Il milite contre l'armement atomique. Agnostique, libre penseur, président d'honneur de la Libre-pensée, il montre une grande ouverture d'esprit et beaucoup d'honnêteté intellectuelle. Lors du procès de Bobigny autour de l'avortement, en 1972, il témoigne en faveur de l'avortement.
Une de ses citations restera à travers le temps : « La science a fait de nous des dieux, avant même que nous méritions d'être des hommes. »
Jean Rostand entre à l'Académie française en 1959 et continue ses campagnes d'information lors de conférences, à la radio ou à la télévision.
Installé depuis 1922 à Ville-d'Avray, dans la demeure qu'avait occupée Valtesse de La Bigne, il y vit jusqu'à sa mort en 1977. Il est inhumé dans le cimetière de Ville-d'Avray.
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