Bordeaux Saintonge et Aunis
Les branches maternelles (suite 1)
Les familles alliées Puyravaud-Bertrand de Montpellier-de-Médillan (17)
Jean Puyraveau (l’orthographe des patronymes n’est pas totalement fixée à cette époque) est forgeron à Montpellier-de-Médillan tandis qu’Amédée Bertrand est de son côté boulanger. Le premier se marie en 1829 avec une fille de meunier, Claire Bertrand, tandis que le second, fils d’un autre meunier (un frère du précédent ?) prend pour épouse Adèle Bernard. Le troisième fils de Jean Puyraveau, Louis-Philippe Puyraveau, devient boulanger, ce qui fait qu’il se rapproche et se marie à la fille d'un boulanger, Mathilde Bertrand, aînée de son frère Achille Bertrand, qui sera polytechnicien (X 1870, rang de sortie 43e sur 141) puis Colonel du Génie et dont il sera question ci-après. Ce dernier aura un fils unique avec Victorine Masson (de la famille des Editions Masson), Pierre Bertrand, qui après des études brillantes au Lycée Buffon puis à l’Ecole spéciale de Saint-Cyr (reçu 13e sur 221 dans la promotion Fez de 1909, de la même promotion que le futur Maréchal Juin classé 7e, et le futur Général de Gaulle au 119e rang), trouvera la mort à 23 ans, en août 1914 (voir ci-dessous le Journal de marche du 37e R.I. et la relation faite par un habitant de Riche de l'épisode du 20 août 1914), comme lieutenant d’infanterie, durant la tragique bataille de Morhange (Lorraine annexée).
Louis-Philippe Puyraveau aura trois enfants, dont mon arrière grand-mère Marguerite Puiravaud (l’orthographe du nom change), épouse de Charles Grange (architecte à Bordeaux – voir par ailleurs) et Jean Puiravaud, officier en Indochine (garde-frontière au Tonkin près de la frontière chinoise à l'époque des Pavillons noirs), qui traversera la Grande guerre sans une égratignure. Marguerite Puiravaud, était une femme énergique, moderne pour son temps, qui accompagnait au piano les films muets de l’époque, et n’hésitait pas à participer aux représentations de pièces de théâtre du barde saintongeais Goulbenèze.
Commandant Jean Philippe Puiravaud (1880-1959)
Engagé volontaire à 19 ans pour 4 ans dans le 3e régiment de Tirailleurs algériens, Jean Philippe Puiravaud participe en 1899 à plusieurs campagnes militaires en Algérie et en Tunisie. Il se marie comme sergent en 1903 à Rioux avec Valentine Couraud. En 1905, il est sous-lieutenant de réserve au 3e régiment de Tirailleurs Tonkinois, en résidence à Bac-Ninh au Tonkin. C’est l’année de naissance de sa première fille Jeanne.
En 1907, il entre dans l’administration indochinoise comme Garde principal de 3e classe de la Garde indigène dans la province de Phuc-Yen au Tonkin où il occupe le poste de Pho-ba-Ché. En 1910, il est de retour à Rioux pour la naissance de sa seconde fille Hélène et devient ensuite en 1912 Garde principal de 2e classe toujours à Pho-ba-Ché dans la province de Quang-Yen (à 21 km de Haïphong) pour être promu en 1913 lieutenant de réserve dans l’Infanterie.
A la déclaration de guerre contre l’Allemagne, il intègre le 3e régiment d’Infanterie Coloniale puis en 1916 devient capitaine à titre définitif au 7e bataillon Indochinois. Il est cité trois fois durant la guerre (en 1915 et 1916) pour des actions d’éclat qui lui vaudront la Légion d’honneur, seulement décernée le 4 février 1921. Entre temps, il a continué la guerre au Tonkin d’octobre 1919 à juin 1920.
De 1920 à 1927, il fera plusieurs allers-retours entre Marseille et Haïphong pour des traversées de plus d’un mois sur les navires André Lebon, Armand Belicq, Azay-Le-Rideau et Porthos. En 1926, il est chef (comme Capitaine d’Infanterie Coloniale) du Centre administratif de Lôc-Binh dans la province de Lang-Son au Tonkin, près de la frontière chinoise. Début 1928, il est admis (à sa demande) à faire valoir ses droits à la retraite (29 ans dans l’Armée, avec entre 1912 et 1914 des postes jugés « malsains ou dangereux »), et après son retour, affecté dans la réserve jusqu’en 1931 au Centre de Mobilisation Coloniale d'Infanterie n°188. Le 25 juin 1931, il devient Chef de bataillon et se retire à Grandjean en Charente-Maritime. Il est promu officier de la Légion d'honneur le 30 juin 1938 sur proposition du Ministre de la Guerre.
Colonel Achille Bertrand (1852-1918)
Achille Bertrand, fils d’un boulanger de Rioux (Charente-Maritime), fit de brillantes études au Collège de Saintes et prépara, outre le baccalauréat-ès-Lettres, celui des Sciences qu’il travailla seul, et réussit brillamment dans les deux à Poitiers. Entré au Lycée Saint-Louis à Paris, il tint de suite la tête de la classe de Mathématiques Spéciales et fut reçu à l’Ecole Polytechnique dès la première année, lui et un camarade d’études, sur 50 candidats présentés. Il sortit de l’Ecole Polytechnique dans le Génie avec la promotion 1872, ayant pour ancien le futur Maréchal Joffre, et pour conscrit le futur Maréchal Foch.
Envoyé comme lieutenant à l’Ecole de Montpellier, il fut nommé capitaine à 25 ans. Le capitaine Bertrand, qui avait déjà montré une grande érudition et une solide instruction technique à l’Ecole du 2e régiment du génie à Montpellier, fut appelé au Dépôt des Fortifications à Paris en 1882. Placé ainsi à la source même des documents de toute nature intéressant l’arme, il y prit rapidement un rôle prépondérant, en rédigeant des avis toujours judicieux et marqués au coin du bon sens. Il contribua largement aux nombreux travaux de cette savante compagnie, en collaboration en particulier avec le colonel Goulier (comme capitaine, Achille Bertrand achève la publication en 1892 des "Etudes théoriques et pratiques sur les levers topométriques et en particulier sur la tachéométrie" du colonel Goulier), soit à l’élaboration de l’Ecole des Levers, soit à la confection du Mémorial des Fortifications et de l’aide-mémoire du Génie. Il a fait partie de la Commission des Poudres et Salpêtres, où ses travaux ont toujours fait état parmi les ingénieurs sous la présidence de MM. Berthelot puis Sarraut, membres de l’Institut.
Après la substitution, en 1886, du Comité du Génie et de la Section technique au Dépôt des Fortifications, il continua ses travaux de toutes sortes et créa en 1887, la Revue du Génie militaire qui remplaça le Mémorial. Cet organe, qui parut d’abord tous les deux mois, prit un rapide essor, et on jugea opportun, en 1895, de le rendre mensuel.
Très versé aussi bien dans les langues mortes que dans les langues vivantes, le capitaine, devenu commandant Bertrand, sut imprimer au nouveau recueil une valeur toujours croissante. Très appréciée dans les armées étrangères, la Revue du Génie militaire trouva sa place marquée dans toutes les bibliothèques techniques et s’échangea avec les revues françaises et étrangères.
Cependant, lorsqu’il fut nommé lieutenant-colonel, on dut envisager pour lui une situation en rapport avec son nouveau grade. Sa vaste érudition et ses services antérieurs le firent désigner pour remplacer le colonel Renard au Laboratoire et aux ateliers d’aérostation de Chalais-Meudon. Transplanté dans un milieu relativement nouveau pour lui, il réussit à y faire prévaloir ses idées, tout en continuant à mener à bien la tâche commencée par son illustre prédécesseur.
Des fonctions plus importantes encore devaient lui être confiées, car étant déjà colonel depuis 1907, on lui donna le poste de Directeur du matériel de guerre du Génie après avoir été en 1912, Inspecteur Permanent de l’Aéronautique Militaire. Toutefois, il ne devait pas le conserver très longtemps, et hanté par le désir de se plonger dans les études abstraites et de goûter un repos bien mérité au milieu des livres qu’il s’était plu à collectionner toute sa vie, il demanda prématurément sa mise à la retraite.
Le 2 août 1914, le colonel Bertrand reçut l'ordre de rejoindre son poste de mobilisation à Lyon, où il était nommé Directeur des Etapes pour l’armée de l’Est, service qu’il avait préparé minutieusement l’année précédente par des conférences faites aux officiers de la région lyonnaise.
Malheureusement, la nécessité de monter à cheval l’arrêta bientôt dans une besogne trop pénible pour son état de santé. Il fut atteint d’une phlébite grave qui l’obligea à abandonner trop tôt un poste qu’il avait malgré tout accepté et entrepris avec courage, entrain et surtout espérance de la Victoire dont il a pu voir luire l’aurore avant de mourir.
Le colonel Achille-Léopold Bertrand, officier de la Légion d’honneur, officier d’Académie, décède à Saintes le 25 octobre 1918, dix-sept jours avant l’armistice, âgé de 66 ans.
Son fils unique, Pierre Bertrand, né à Paris le 23 janvier 1891, a été tué à la tête de sa section au 37e régiment d’infanterie (appartenant à la "Division de Fer"), au combat de Morhange, le 20 août 1914. Ce jeune homme laisse en manuscrit un recueil de Sonnets, dont quelques uns ne manquent pas de talent et de flamme patriotique.
Revue de Saintonge et d’Aunis, tome XXXVIII
Février 1919
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